Les traditions de Pâques — Diocèse de Coutances

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Les traditions de Pâques

Corinne MERCIER/CIRIC

Célébrant un épisode fondamental de la foi chrétienne, nombreuses sont les coutumes festives accompagnant les fêtes de Pâques. Mais depuis quand les cloches pondent-elles des œufs ? Et pourquoi la viande d’agneau est-elle autant plébiscitée ? Lumière sur certaines coutumes traditionnelles et folkloriques, parfois remplies de symbolisme et de signification liturgique.

Les cloches en liesse

Alors qu’elles se sont tues depuis le Jeudi saint, les cloches sonneront à nouveau à la Vigile Pascale, signalant un temps d’allégresse et de grande joie pour tous les chrétiens.

Même si le lapin de Pâques, tradition d’origine germanique, leur fait aujourd’hui sérieusement concurrence, il a longtemps été coutume de raconter aux enfants que les cloches, ou du moins « leurs âmes », s’étaient absentées quelques jours pour aller jusqu’à Rome et que leur retour célébrait la Résurrection du Christ.

De fait, comme l’explique le folkloriste Arnold van Gennep, les cloches ont longtemps eu une place particulière dans l’imaginaire commun car rythmant le quotidien de tout un chacun.

« Il existe un folklore spécial des cloches, construite sur cette idée qu’elles sont à quelques degrés des êtres vivants et non des objets quelconques car elles ont une voix, on les baptise, elles pleurent ou sont joyeuses, se mettent d’elles-mêmes en branle lors d’évènements graves ou merveilleux, […] et du Jeudi au Samedi saints, elles « partent en voyage [à Rome]. »[1]

La chasse aux œufs

Selon cette tradition, les cloches auraient donc fait tomber sur leur trajet retour des œufs dans les jardins, donnant lieu à des « chasses aux œufs », pour petits et grands.

Bien qu’il soit difficile de dater avec précision la tradition des œufs de Pâques, on retrouve trace de la première benedictio ovorum (bénédiction des œufs) en France à la fin du XIIème siècle[2].  En effet, les origines de cette tradition font encore débat parmi les folkloristes. Certains y voient la survivance d’anciennes traditions antiques et germaniques célébrant le retour du Printemps, l’œuf représentant symboliquement la fécondité et le commencement de la vie. D’autres, comme Amédée de Ponthieu, plébiscitent des raisons beaucoup plus matérielles : du fait de la grande quantité d’œufs entassés pendant le Carême, temps marqué par le jeûne, il était impératif de consommer rapidement les stocks. Ainsi, les œufs étaient peints et décorés pour en faire des présents symboliques. Des temps de quêtes à travers les villes, appelées « les pâquerets » dans l’Eure, étaient également organisées par les enfants de chœur, parfois accompagnés de certains clercs ou bedeaux.[3] Les œufs et légumes récoltés à cette occasion pouvaient être vendus aux enchères au profit des églises ou bien partagés entre les quêteurs.[4]

Au XVIIIème siècle, il était traditionnellement admis que l’œuf le plus gros pondu pendant la Semaine sainte revenait de droit au roi[5]. Réalisés pour la première fois à la demande du roi Louis XIV, il faudra attendre le XXème siècle et l’industrialisation pour que se répandent les œufs en chocolat que l’on connaît aujourd’hui.

Banquets et sociabilité

Ainsi, les fêtes de Pâques furent rapidement l’occasion de grandes festivités, le lundi étant chômé. Bien souvent, on « mangeait omelette » comme le voulait la tradition. Cette dernière accompagnait des plats à base de viande de différentes natures selon les régions. Dans ces traditions culinaires, l’agneau, en référence à l’agneau pascal, a aujourd’hui encore une place de choix.

Au-delà de ces coutumes alimentaires, les fêtes de Pâques sont aussi et surtout marquées par des temps de sociabilité et de communion. En Normandie par exemple, ces fêtes étaient propices à des parties de Soule[6] ou des pèlerinages.  Aujourd’hui encore, les fêtes de Pâques sont l’occasion de se retrouver pour partager et célébrer ensemble la Bonne Nouvelle du Christ ressuscité.

À toutes et tous, joyeuses fêtes de Pâques !

 

[1] Van Gennep Arnold, Manuel de folklore français contemporain, T.I, éditions A et J Picard et Cte, Paris, 1947.
[2] Ibid.
[3] Bedeau : laïc aidant au rangement dans une église.
[4] Van Gennep Arnold, op.cit.
[5] Van Gennep Arnold, op.cit.
[6] Soule : du normand « choule », sport traditionnel normand, ancêtre présumé du rugby.